Dans le Cercle de Kita, le maraîchage est une activité essentiellement pratiqué par les femmes. Ces dernières ont peu accès aux insecticides ou utilisent parfois ceux destinés au coton pour lutter contre les attaques de ravageurs. Ces attaques sont d’autant plus importantes que dans les jardins collectifs, certaines paysannes y maintiennent quelques plants de légumes pendant la saison des pluies (piment, aubergine locales, haricots, …) pour assurer la période de soudure alimentaire. Or, sur cette période les femmes consacrent tout leur temps à leur parcelle d’arachide ou participent aux travaux champêtres des champs familiaux. N’ayant que très peu de temps à consacrer au désherbage, la production de ces légumes est faible, voire quasi nulle.
Afin de réduire l’usage d’insecticides et d’améliorer la production maraichère, AVSF accompagne ces groupements féminins et teste avec eux depuis 3 ans, la fabrication et l’utilisation d’un biopesticide naturel à partir de matières premières disponibles localement.
Rompre le cycle des ravageurs
Dans ces parcelles, la présence à l’année de plants légumiers offre suffisamment de ressources aux ravageurs pour poursuivre leur cycle. Afin de rompre ce cycle et réduire l’enherbement, il a été adopté dans certains jardins la culture de manioc. Planté en mars, il atteint dès la fin-mai un enracinement et une taille suffisante ne nécessitant plus d’arrosage : ce stade coincïde avec le démarrage de la saison des pluies et le début de la préparation des champs d’arachide.
Du fait de sa forte couverture au sol, un seul désherbage en début de saison des pluies suffit alors. Le manioc est ensuite récolté en octobre, juste avant que les activités de maraîchage ne démarrent en novembre, procurant ainsi un revenu et un aliment supplémentaire que les femmes n’avaient pas avant.
Des biopesticides locaux
Un biopesticide composé de graines d’Azadirachta indica (neem), de Cassia Nigricans, de piment et d’huile de Carapa Procera (Koby toulou en Bambara) s’est révélé être efficace sur le coton et dans les jardins, à raison de 6 traitements sur le cycle.
Ce biopesticide présente également un avantage économique : le coût de revient est passé de 55,5€/ha avec un insecticide chimique à 29,5€/ha, si les femmes devaient acheter tous les ingrédients. Comme seule l’huile de Koby est achetée sur le marché, en ajoutant le temps de collecte des matières première et de préparation, la préparation revient à un coût total de 5€/ha par cycle.
Actuellement les agriculteurs et les maraîchères testent d’autres préparations pour éviter un risque d’accoutumance des insectes et donc une moindre efficacité du traitement.
Des résultats parlants
Les résultats parlent d’eux-mêmes. Dans les 5 jardins gérés par des groupements féminins, la production maraîchère agroécologique a atteint une valeur record de 30 500 € en 2018. C’est par la démonstration des bénéfices produits par les alternatives que nous pouvons encourager les acteurs à prendre activement part à la transition agroécologique. Mais pour déployer ces alternatives à grande échelle, il faut tester, faire certifier, produire, diffuser, et s’organiser à les vendre à un prix qui correspond aux moyens et réalités paysannes.
Pour trouver des pistes de solutions à ces préoccupations, des agronomes et vétérinaires bénévoles d’AVSF élaborent actuellement un guide des alternatives aux pesticides, qui nous l’espérons, sèmera avec l’aide des paysans, les graines du changement.