Le Sud de Madagascar est régulièrement exposé à des épisodes de sécheresses chroniques. Dans cette région difficile d’accès, le « kéré » – ou famine en malgache – guette la population de manière cyclique, tous les deux ou trois ans, en raison de l’absence prolongée de précipitations. Les enfants sont toujours les premières victimes de la malnutrition en ces périodes récurrentes de pénurie alimentaire.
Depuis 2020, la région d’Androy est en proie à une famine particulièrement grave, directement liée au changement climatique. Dans cette zone où sont principalement cultivés le maïs et le manioc, l’absence de pluie a laissé les habitants qui vivent en majorité de l’agriculture, sans récolte.
Pour tenter d’assurer la sécurité alimentaire et financière de ces communautés, AVSF met en place depuis mars 2020 un projet sur quatre ans dans les districts d’Ambovombe et de Tsihombe. Il agit sur 2 axes : l’amélioration génétique des élevages caprins pour une meilleure résilience des élevages ainsi que l’appui technique et le renforcement de capacités des organisations d’éleveurs.
Identifier les groupements d’éleveurs
Outre de subir de front les aléas climatiques, la zone du projet, très enclavée, est particulièrement marquée par l’absence de l’État et une difficulté d’accès à certaines ressources naturelles nécessaires à la production agricole (par exemple, l’eau d’irrigation). Insérées localement, les équipes d’AVSF ont tout d’abord sillonné les villages pour identifier et recenser des groupements d’éleveurs susceptibles d’être motivés par le projet.
Dix groupements d’éleveurs, soit environ 225 producteurs, ont ainsi été sélectionnés sur des critères géographiques, de taille, mais aussi de motivation et de capacité à apporter une contribution propre, qu’elle soit financière, matérielle ou foncière. Autant d’éléments importants pour la pérennité du projet dans un contexte où les populations ont l’habitude de projets d’urgence récurrents (le Plan Alimentaire Mondial intervient depuis plus de vingt ans dans la région, sans discontinuer).
Innover face au changement climatique
Pour améliorer les revenus des éleveurs, vingt fermes-écoles paysannes sont créées au second semestre 2021 pour servir de terrain de recherche et de démonstration. Quatorze d’entre-elles sont dédiées à l’amélioration génétique des élevages caprins. Elles ont pour but, grâce à une sélection « massale », d’assurer la multiplication de reproducteurs locaux sélectionnés pour leurs excellentes caractéristiques (constitution, rusticité, production laitière, production de viande, etc.) afin d’améliorer la « race » locale de chèvre.
En parallèle, le partenariat engagé avec l’ONG locale CTAS (Centre Technique Agroécologique du Sud) permet la fourniture de semences résistantes à la sécheresse aux bénéficiaires, telles que le sorgho, le mil ou encore des boutures ‘cladotes’ de cactus inermes, qui serviront de nourriture, de fourrage ou de haies. Avec un faible besoin d’eau, le mil et le sorgho ont pu tolérer la sécheresse de l’année 2020 et du début 2021 ; les paysans ont pu commencer les récoltes dès le mois de mai 2021.
Professionnaliser les éleveurs
Par ailleurs, neuf groupements d’éleveurs de chèvres et de volailles sont accompagnés pour mieux valoriser leurs productions sur les marchés locaux, dont l’approvisionnement est insuffisant par rapport à la demande, et améliorer ainsi leurs revenus. Des points de vente sont organisés, des contrats avec des partenariats commerciaux négociés et la vente directe est encouragée. Le projet prévoit qu’à terme (fin-février 2024), trois cents reproducteurs améliorés aient été distribués à des éleveurs et éleveuses, et que les vingt fermes-écoles paysannes fonctionnent de manière autonome pour pérenniser ainsi, après la fin du projet, leur fonction de diffusion de patrimoine génétique amélioré.
Le projet prévoit aussi de renforcer les organisations de producteurs de volailles et de caprins autour de Tsihombe, pour que ces secteurs gagnent en professionnalisme.