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Paulin Hyac nous parle du lien entre production agricole et qualité des sols à Madagascar

De quoi parle-t-on quand on parle « des sols » ?

Le sol, ce ne sont pas seulement les premiers centimètres de terre sous nos pieds comme on le pense trop souvent. Ce que l’on appelle un « sol » en pédologie (la science du sol) est la partie superficielle de l’écorce terrestre comprise entre la surface et la roche altérée, constituée de matériaux minéraux et organiques divers.

Amélioration de la fertilité, régulation des flux d’eau, détoxification des polluants, stockage du carbone, régulation de la composition de l’atmosphère sont autant de services écosystémiques indispensables à la vie sur Terre rendus par le sol. Ce dernier a donc un impact direct sur la régulation du climat, la préservation de la biodiversité et la production agricole.

Compte tenu des conditions climatiques (pluviosité, température), les sols des zones intertropicales sont très différents des sols des régions des climats froids et tempérés. Ils sont notamment beaucoup plus profonds : moins d’un mètre sous des climats froids et tempérés, et plusieurs dizaines de mètres en milieu tropical.

Quel est l’état des sols aujourd’hui dans les pays tropicaux, notamment à Madagascar ?

Dans les pays tropicaux en voie de développement, la démographie croissante se traduit par une pression foncière de plus en plus forte. Il en résulte que les systèmes traditionnels qui alternaient défrichement, culture puis jachère, comme ici à Madagascar, et qui étaient adaptés à une population faible et stable, ne le sont plus aujourd’hui. 

Le nombre croissant d’agriculteurs sur des surfaces constantes entraîne une diminution de la surface disponible par personne, une réduction des temps de jachère et in fine une dégradation générale des sols : baisse de fertilité, augmentation de l’érosion, perte de biodiversité faunique et microbienne, etc. Par ailleurs, dans un contexte de forte pauvreté, le paysan n’a généralement pas les moyens d’apporter aux sols de la fumure organique ou d’acheter en complément, des engrais chimiques, à moins que des systèmes d’accès à ces ressources ne soient mis en place, comme des micro-crédits ou des subventions. 

En conséquence, la consommation d’engrais organique ou de synthèse est à un niveau très faible et largement en dessous de ce qu’elle devrait être pour apporter au sol les éléments nutritifs exportés par les récoltes, les fourrages et l’exploitation des forêts, sans compter les pertes d’éléments nutritifs dues à l’érosion. À Madagascar par exemple, la consommation d’engrais est nettement inférieure à 10 kg par hectare et par an, alors que 5 à 10 fois plus serait nécessaire pour une productivité correcte. À noter également que les faibles moyens des producteurs les amènent à acheter les engrais les plus économiques possibles et donc, le plus souvent, nocifs à plus ou moins long terme sur les sols, la faune et la flore. 

Le sol est pourtant une ressource vitale non-renouvelable à l’échelle de la vie humaine. Reconstituer la surface d’un sol après érosion demande des centaines à des milliers d’années. 

Selon vous, comment pouvons-nous limiter l’impact de la production agricole sur la qualité des sols ?

Le problème de la gestion durable des terres pour l’agriculture est complexe. L’enjeu est d’augmenter les rendements des cultures en parvenant à un niveau de fertilisation plus élevé avec un coût acceptable pour le paysan. Pour cela, il faut favoriser toutes les pratiques valorisant les ressources naturelles locales : légumineuses, valorisation des déchets organiques, valorisation des espèces forestières, etc. À Madagascar, diverses pratiques agroécologiques ont prouvé leur efficacité en termes de gestion durable des terres. On peut par exemple citer : la fertilisation organique (lombricompost, compost liquide et solide, etc.), la valorisation des biomasses (association graminées-légumineuses, haies vives, etc.) les plantations sylvicoles, l’agroforesterie, le non- brûlis des terres, que ce soit des jachères ou des résidus de récolte, ou encore les cultures de conservation, sans travail du sol et sous couverture végétale. 

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