La belle histoire AVSF : les Caravanes du Sahara

Il est 5h30. Les rayons du soleil levant caressent doucement l’horizon. Une mer de sable ondule sous le souffle encore frissonnant de la nuit. Sidi Mohamed boit un café brûlant, assis au coin du feu. Nous sommes dans le camp de Tin-Timakayene dans le région de Taoudeni à 209 km de Tombouctou dans le nord du Sahara.

Aujourd’hui, Sidi et son équipe ont une longue journée qui les attend. Plusieurs cas urgents nécessitent leur attention. En tant qu’infirmier de l’équipe, il est en charge de l’organisation des soins et a déjà préparé le programme d’interventions. Tout d’abord, une femme enceinte présente des douleurs anormales. Sa collègue, infirmière obstétricienne, Mama Touré est inquiète et l’a veillée toute la nuit. Dans l’enclos de fortune construit pour leur venue, Bassala Touré, le technicien supérieur d’élevage, est déjà en train de soigner un jeune dromadaire qui boite, sous l’œil attentif et reconnaissant de l’éleveur. Les blatèrements ont brisé le silence de la nuit qui s’était attardé aux premières lueurs du jour. Le camps s’éveille et s’active. Il est temps de préparer la tente de soins car déjà leur guide facilitateur, Man Ould Boubacar Sadeck, vient les prévenir qu’un des enfants a une forte fièvre et vomit. Sidi prend dans son sac une grande bâche qu’il secoue pour la débarrasser du sable de la tempête de la veille. A l’aide d’un arbre, il parvient à installer une tente de fortune pour les soins de la journée. 

Les caravanes de santé mixte : un espoir pour les populations défavorisées 

Cela fait bientôt 10 ans qu’il travaille pour AVSF-Adesah. Originaire de la région de Tombouctou, il sait l’espoir que représentent les « équipes mobiles, ou caravanes, de santé mixte » (humaine et animale) pour ces populations défavorisées. Quand il a commencé, les personnes qu’ils soignaient n’avaient jamais connu le moindre service médical d’Etat. Souvent très éloignées des structures de soins (plus de 350km), les familles de nomades étaient et sont encore très vulnérables aux maladies et aux caprices de la nature aride dans laquelle ils vivent. Les «caravanes », qui œuvrent depuis plus de 15 ans à leurs côtés, ont permis de grandes avancées sanitaires de par les soins curatifs et préventifs proposés gratuitement.

Quand on le lui demande, Sidi est fier de dire que grâce à son travail et au dévouement de toutes les équipes d’AVSF-Adesah, les décès de suite de couche ont diminué de 95%, les épidémies de rougeole, coqueluche et méningites ont chuté à presque 100%, les décès dus à la malnutrition ne représentent plus que 2% et les décès des suites de paludisme, bronchopathie et autres maladies endémiques ne représentent plus que 5% des décès dans toutes les zones d’intervention. C’est à présent le milieu de matinée, Mama Touré vient le voir. La femme dont elle s’occupe depuis la veille a des contractions et est sur le point d’accoucher. Elle n’est qu’à 7 mois de grossesse et n’a jamais été suivie. Il faut se tenir prêt a évacuer le nourrisson car celui-ci va avoir besoin de soins et d’un suivi dans un établissement de santé.

Sidi termine l’examen de l’enfant dont il s’occupait avant l’arrivée de Mama. Celui-ci est faible et déshydraté, il a besoin d’être perfusé. L’infirmier lui pose un cathéter en quelques minutes et l’installe aussi confortablement que possible dans la tente. Une des branches de l’arbre est situé à la bonne hauteur et fera parfaitement office de potence pour la poche de perfusion. Pas le temps de traîner, il faut aller aider Mama pour la seconder dans l’accouchement qui risque d’être difficile. Il sort de la tente. Le soleil ardent illumine le paysage de ses rayons brûlants. Les dunes, si belles et si hostiles, se troublent sous la chaleur intense du désert. Des hommes sont assis en cercle et boivent du thé à la menthe à l’écart de la tente d’accouchement. La coutume ne leur permet pas de participer aux soins des femmes. Après plusieurs heures de travail, le bébé nait. C’est un garçon. Il est très petit et fragile et a du mal à respirer. La mère souffre et saigne beaucoup. Il faut les évacuer. On les installe aussi bien que possible dans le véhicule. Ali est déjà au volant. Mama et Sidi montent à leur tour pour continuer les soins. Dans un nuage de poussière et de sable, ils partent sur la piste irrégulière vers l’hôpital de Tombouctou.

Ainsi s’achève une journée de terrain avec l’équipe des caravanes d’AVSF. Ensemble, Sidi et Mama réussirent à sauver la jeune mère et le nouveau né. Revenus au camp quelques années après, il purent voir de leurs yeux le petit garçon en parfaite santé égayer de son rire enfantin les plaines de sable aride du désert du Sahara.

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