Après une période particulièrement compliquée et violente de son histoire sous le régime des Khmers rouges, le Cambodge peut se vanter d’avoir diminué de moitié son taux de pauvreté entre 2014 et 2022. Même si la grande pauvreté est encore loin d’avoir été éradiquée aujourd’hui, ces progrès prouvent qu’elle n’est pas inéluctable.
Dans les villages, après le riz, l’aviculture est une des productions vivrières principales pour assurer la sécurité alimentaire des familles. Une production qui, comme l’explique Manuelle Miller, chargée de programmes chez AVSF, « a été fortement affectée dans les années 2010 par l’épidémie de grippe aviaire qui a déstabilisé la sécurité économique et alimentaire des familles, puis à nouveau en 2020, comme le reste de l’économie, par la crise du covid. »
Le succès des ACSA
Pour des milliers de familles, avoir des animaux en bonne santé est vital. C’est pourquoi AVSF agit depuis presque 30 ans pour lutter contre l’émergence de maladies animales. Une des actions emblématiques de l’ONG dans le pays a été la formation de plus de 2 700 auxiliaires communautaires de santé animale (ACSA). Ces agents pallient au manque de vétérinaires dans les villages en proposant des services de santé animale de proximité. Pour cela, ils et elles sont formés tant aux compétences techniques vétérinaires (épidémiologie, prévention des maladies et traitements, amélioration de la production) qu’aux compétences marketing pour promouvoir leurs activités.
Devant le succès des ACSA, pouvoirs publics et autres entités privées se sont emparés de ce sujet et ont répliqué cette approche. À l’heure actuelle, le Cambodge compte 12 000 de ces « animal health workers » dont le statut est officiellement reconnu par les autorités depuis 2011.
Améliorer le quotidien des éleveurs et éleveuses
Avec le petit élevage avicole, la viande et les œufs viennent non seulement enrichir l’alimentation des familles en apportant une source de protéines importante, mais permettent également de générer des revenus supplémentaires grâce à la vente sur les marchés locaux.
Dans la ferme qu’elle gère avec son mari Monsieur Ouk Someth dans la province de Takeo, Madame Touch Teary est en charge des poulets et du potager. Les deux activités sont complémentaires : les restes du potager permettent de nourrir les poulets, et le fumier obtenu à partir des excréments animaux permet de fertiliser naturellement les sols.
Le couple, accompagné par le projet « One Health » (Une Seule Santé), a fait face à de nombreux problèmes : pertes importantes à cause des conditions climatiques, poulets aveugles suite à la mauvaise utilisation d’un vaccin, piqûres d’insectes, etc. Afin de réduire la mortalité de son troupeau de volailles, Monsieur Ouk Someth a bénéficié d’une formation de deux jours pour pouvoir apporter lui-même les soins de base à ses animaux. Si le besoin dépasse son champ de compétence, il fait appel à l’ACSA du village. La création d’un groupe sur l’application de messagerie Telegram, entre les éleveurs de la région et des ACSA, permet également de favoriser l’échange de connaissances et la solidarité.
Quels résultats ?
Le projet « One Health » a donc permis d’améliorer les revenus et les conditions de vie d’éleveurs et éleveuses de poulets au sein de 8 villages. En deux ans, leurs revenus ont plus que doublé ! Plus de 10 000 poulets ont été vermifugés et vaccinés contre les maladies saisonnières. On estime également que 95 % des éleveurs-euses ont amélioré leurs pratiques, en termes d’hygiène, d’alimentation, d’hébergement des poulets, et bénéficient aujourd’hui de meilleurs rendements.
Une vraie réussite pour les équipes cambodgiennes d’AVSF qui luttent sans relâche depuis près de 30 ans aux côtés des familles paysannes les plus vulnérables dans le but de les aider à sortir du cercle vicieux de la pauvreté et assurer leur sécurité alimentaire.
Portrait
Monsieur Bin Virak est éleveur de poulets et de cochons dans la région de Takeo,au Cambodge. Il cultive également du riz et des légumes destinés à la vente sur les marchés et à la consommation de sa famille. En 1992, il fait partie de la première promotion d’Auxiliaires Communautaires de Santé Animale formés par AVSF. À raison de deux demi-journées par semaine sur 6 mois, il acquiert les compétences techniques liées à la santé et à la production animale.
Encore aujourd’hui, les éleveurs et éleveuses alentour l’appellent quotidiennement pour soigner leurs animaux, ce qui lui permet de gagner environ 10 dollars supplémentaires par jour. Il est considéré comme le meilleur ACSA de la région ! Il est également devenu le président de la coopérative Sokpheap Yeong, appuyée par AVSF depuis 2017 dans le cadre du projet « One Health ».