La région de Pasto en Colombie regorge de plantes médicinales. Marine et Adrien, deux vétérinaires bénévoles, sont partis à la rencontre de familles d’éleveurs pour étudier les pratiques ethno-vétérinaires, alternative fiable et durables aux médicaments conventionnels.
Le Pasto est la première région laitière de Colombie. Toutefois, entre grandes fermes laitières et petits éleveurs en polyculture-élevage, la production et les richesses sont mal réparties. Pour les 56 éleveurs et éleveuses ayant participé au projet, la vente du lait constitue généralement leur seul revenu journalier. Mais ces éleveurs, d’environ cinq vaches en moyenne, souffrent tous du même problème : le manque d’accès aux soins vétérinaires.
Combattre l’antibiorésistance
Dans les pâturages du Pasto, la mammite, inflammation du pis, demeure une menace constante entraînant des répercussions sévères tant sur la santé des animaux que sur les finances des éleveurs. Cette infection récurrente est la première cause de recours aux médicaments vétérinaires, en particulier aux antibiotiques. Cependant, sans encadrement technique adéquat, l’administration incorrecte de ces médicaments par les éleveurs engendre de plus en plus d’antibiorésistance.
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, il s’agit d’une des plus graves menaces pesant sur la santé mondiale. Causée par un mésusage des antibiotiques, elle prive l’humanité de l’efficacité de molécules précieuses permettant de lutter contre des infections potentiellement mortelles.
Ainsi depuis de nombreuses années, AVSF accompagne les éleveurs et éleveuses dans un usage raisonné du médicament et promeut activement la recherche-action sur la médecine ethno vétérinaire comme complément, voire alternative.
Soigner par les plantes
Les traitements naturels sont ancrés dans la culture locale du peuple indigène Pasto. Pourtant, ces savoirs traditionnels transmis de génération en génération ont tendance à se perdre. L’objectif de cette action était donc de recenser, tester et valoriser les remèdes les plus efficaces pour réduire la dépendance des éleveurs aux médicaments de synthèse. Ce travail a permis d’identifier sept plantes aux propriétés anti-inflammatoires et anti-bactériennes : le calendula, la camomille, la morelle douce-amère, la courge, l’oseille crépue, l’ail et l’aloe vera.
S’appuyant sur des pratiques locales et une étude réalisée en partenariat avec l’Université de Nariño, l’équipe du projet a proposé aux éleveurs et éleveuses plusieurs traitements selon trois types de préparations : des bains anti- inflammatoires, des préparations huileuses ou alcooliques pour application intra-mammaire, et enfin une teinture de post-trempage pour application externe après la traite. Afin de faciliter l’appropriation de ces remèdes par les éleveurs et éleveuses, un guide a été élaboré qui détaille les propriétés de chaque plante, propose des recettes de traitements éprouvées et explique leur mode d’utilisation.
Offrir aux familles paysannes des alternatives viables à l’utilisation parfois risquée des médicaments de synthèse répond à un besoin crucial, tant pour la santé des animaux que pour celle des humains et la préservation de l’environnement. En utilisant les ressources disponibles localement, les éleveurs peuvent non seulement traiter les maladies de leurs animaux de manière sûre et efficace, mais aussi réduire leur dépendance à des médicaments potentiellement dangereux. De plus, valoriser ces savoirs ancestraux renforce le lien entre les communautés rurales et leur environnement naturel, favorisant ainsi une gestion durable des ressources.