Les expériences innovantes d’ASVF : Partager l’eau en Equateur
Publiée dans la collection « Les expériences innovantes d’AVSF » de RURALTER/PRAXIS, cette note retrace les grandes étapes d’une coopération mise en place par AVSF pour une gestion concertée de l’eau pluri-acteurs dans le bassin versant de la rivière Chambo, dans les Andes Centrales d’Equateur. Des acteurs aux intérêts aussi divergents que des collectivités rurales et la ville de Riobamba, capitale provinciale de 150.000 habitants en pleine croissance démographique, des entreprises et les familles paysannes rentrent en concurrence pour l’accès à l’eau, dans des relations encore très asymétriques de pouvoir.
Partant du principe que la problématique de l’eau ne se résout pas seulement par la construction d’ouvrages mais par la manière de la partager et la gérer, AVSF et l’ONG équatorienne CESA (Centrale Equatorienne de Services Agricoles), ont décidé en 2007 d’accompagner la création d’un dispositif de concertation qui devrait permettre à tous ces acteurs de négocier des accords à bénéfice réciproque dans le domaine de la répartition de l’eau et de sa gestion, et de mutualiser des moyens techniques et financiers pour une protection collective de la ressource. Cette coopération s’est d’abord construite sur un diagnostic de la situation et la transmission transparente d’informations accessibles à tous, élément vital pour la prise de décision. Elle a ensuite privilégié des échanges d’expériences en Equateur mais également avec divers acteurs de la gestion de l’eau en France (collectivités, associations d’usagers, agence de l’eau Seine-Normandie, notamment). Les résultats sont prometteurs : création d’un comité de bassin où siègent les représentants des différents usagers, mise en place d’un instrument financier pour des actions de sensibilisation à la gestion et protection de l’eau, prémices d’accords politiques entre ville et irrigants indiens pour le partage de l’eau, construction collective d’un plan de gestion des ressources hydriques à l’échelle du bassin Chambo, mise en place d’infrastructures pilotes de traitement des eaux usées, etc.
L’expérience en cours témoigne de l’importance et la pertinence d’une coopération dans le domaine de la gestion sociale de l’eau au delà de la seule construction d’infrastructures, qui intègre l’appui à la gestion de conflits, à la réforme de règles de partage de l’eau, à la redéfinition des droits et obligations de usagers et à la création des institutions en capacité d’exercer un contrôle efficient sur la gestion et la protection de la ressource. Elle démontre tout l’intérêt d’y associer les compétences et expériences diversifiées d’acteurs français dans ce domaine. Dans le cas équatorien, cette coopération technique s’accompagne d’une nécessaire coopération financière particulièrement pertinente : elle a en effet permis la prise en charge des coûts les plus difficiles à couvrir pour les finances publiques nationales et locales : études, expertises permanentes et spécialisées, échanges, espaces de concertation, gestion de conflits.
Cette expérience invite finalement les acteurs de la coopération, en particulier les collectivités françaises et agences de l’eau à prendre en compte l’enjeu majeur de demain sur l’eau : le partage équitable et la protection de la ressource en eau, en particulier entre villes et campagnes, pour assurer demain l’alimentation de tous et des villes en croissance, en garantissant ainsi l’accès à l’eau aux agricultures paysannes qui contribuent à la sécurité alimentaire.